Depuis quelques temps des internautes s’offusquent des transformations qui sont infligées à la plus belle ville du monde. A la manœuvre il y a eut d’abord Bertrand Delanoë puis sa suppléante Anne Hidalgo qui a pris les rennes de la Mairie depuis 2014. Une ville que la maire actuelle a toujours souhaité réinventer et ce pour rendre Paris encore plus beau. Voilà en quelques mots comment l’action de l’équipe de la mairie de Paris a pu irriter certains parisiens et certaines parisiennes au point de déclencher une polémique.
Saccage Paris, quand les parisiens sonnent l’heure de la révolte
Nota Bene: cette installation a été déclarée via l’application Paris j’écoute, qui a répondu qu’il était impossible d’intervenir. Motif : « installation Enedis commerçants ». Où comment institutionaliser les installations défaillantes et le scotch à Paris.
De plus en plus abasourdis par les installations artistiques ou par le mobilier urbain des parisiens se sont insurgés sur les réseaux sociaux via les mots clefs : saccage Paris. A partir de ce moment « l’intelligence collective » a commencé à se mettre en marche. Des milliers de messages ont été postés, avec des photos à l’appui et des commentaires souvent très durs.
Il est vrai que l’action de la Mairie en matière d’entretien ou d’urbanisme aurait pu rester encore longtemps ignorée de la grande majorité des français. Mais depuis déjà quelques années un mal ronge la capitale. En effet pour entretenir la plus belle ville du monde il faut faire des travaux. Remplacement des canalisations, remplacements de joints sur les piles des ponts, installation de la fibre, sécurisation du réseau de distribution de gaz (rue Trévise). Bref Paris est en plein chantier depuis quelques années déjà et la responsabilité de la Mairie commence à se poser. Un acteur de cinéma, Vincent Lindon avait d’ailleurs poussé un retentissent coup de gueule sur une chaine télé. « elle creuse des trous depuis 17 ans » (il parlait d’Anne Hidalgo NDLR)
Par contre autour de toutes ces palissades et de ces trous qui exaspèrent les habitants de Paris fleurit du mobilier urbain. Des objets qui aussi tôt installés sont autoproclamés comme étant beaux ou écologiquement responsables par la Mairie ou par son génial inventeur. Et même si l’on fréquente les galeries d’art contemporains la ficelle qui consiste à tout classer dans la case artistique commence à être un argument qui fatigue les parisiennes et les parisiens.
La ville de Paris doit-elle devenir une galerie d’art contemporain à ciel ouvert ?
« L’ennemi de l’art c’est le bon goût ». Cette citation de Marcel Duchamp préfigure la défiguration de Paris. Car l’art n’est pas sensé être beau. Voilà donc le risque que l’on court lorsque l’on se lance sur la voie de l’art contemporain. De plus la Mairie a longtemps reproché à Paris de devenir une ville musée (c’est à dire une ville vidée de ses habitants, ndlr). Mais malgré ces déclarations d’intentions les responsables de la Mairie de Paris font en fait tout ce qu’ils peuvent pour que Paris deviennent une ville musée. Ils font exactement mot pour mot ce qu’ils dénoncent comme étant le mal absolu.
Tous les designers et autres architectes vous le diront pour vivre sereinement dans un univers il faut que les couleurs qui vous entourent soit douces et que les objets soient relativement arrondis. Avez-vous déjà essayé de vivre dans un pièce peinte en rouge en orange fluo et en noir? Pourquoi la couleur des murs des chambres d’hôpital est-elle soit beige, soit jaune clair ou bleu pastel?
« Paris ne doit pas devenir une ville musée », c’était l’adage des communicants de la marie de Paris.
Des œuvres d’art qu’il serait inopportun de juger
Or le vrai problème à Paris c’est que les œuvres d’art cherchent à tout prix à interpeller le marcheur pour lui révéler et imposer sa présence. Au programme vous avez une Fontaine Wallace repeinte en rose vif, quelle audace. Mais également un installation métallique éphémère peinte en jaune au pied de la Tour Eiffel. Le tout au milieu des barrières en plastique rouge de l’opération Paris respire. Le tout dans une ambiance assez sale, où un rapport ad hoc de 2018 ou 2017 commandé par la Mairie stipulait que la faute revenaient aux touristes qui jetaient leurs papiers et autres déchets parterre. Rien n’est trop gros. La crise sanitaire est passée par là, il n’y a plus de touristes à Paris et la ville est toujours aussi sale. Un outrage de plus à Paris.
Que l’on aime où pas les installations de la Maire de Paris c’est une chose, mais ce qui est vraiment pénible c’est tout le verbatim qui va avec. Un verbiage qui illustre avec brio tout le mépris que l’aristocratie parisienne peut avoir pour le peuple qui ne comprend rien à l’art, au choix judicieux de la Mairie et à l’urbanisme. Réinventer Paris, rendre Paris encore plus beau, a-t-on déjà entendu ces mots dans la bouche de Jacques Chirac l’ancien maire de Paris? Et pourtant cet homme était féru d’arts premiers. Il a même été l’instigateur du musée du Quai Branly. Un musée qui porte aujourd’hui son nom.
Une ligne de défense contestable
« Sans liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur ». Beaumarchais
Face au déferlement de critiques dont les réseaux sociaux et leur algorithme ont le secret, la Mairie de Paris a commencé à réagir. Tout d’abord via son compte twitter elle dénonçait une campagne de dénigrement. Ce que vous voyez n’est pas ce que vous voyez mais une campagne de dénigrement. Circulez il n’y a rien à voir. En off, certains communicants de la Mairie aurait même laissé sous-entendre qu’il s’agirait d’une attaque groupée venant de l’extrême droite (pour rappel l’extrême droite a fait 1,5% aux dernières élections municipales à Paris. source: le Monde – enjeux et résultats).
Diaboliser l’adversaire pour mettre fin au débat est une vieille technique utilisée un temps par Staline. Il traitait ses détracteurs de nazis et les laissaient ensuite se débattre dans une argumentation qui ne portait plus que sur leur prétendue appartenance à un mouvement fasciste. Force est de constater que le point Godwin et la rhétorique « stalinienne » ne sont jamais très loin dans les débats et ce même en ce début XXI ème siècle.
Heureusement le compte twitter d’EELV Paris 5 amenait un peu plus de sérénité dans le débat. La section du 5 ème expliquait qu’il y a certes des gens qui « expriment leur aigreur » et d’autres leurs désaccords. Mais parmi les critiques il y a « ceux qui pointent des dysfonctionnements réels ».
En d’autres termes il est un peu trop facile de dire que les équipes de nettoyages sont dépassées par les incivilités des parisiens. Il y a un vrai problème de fond. Y voir une attaque politique alors que les dernières élections se sont tenues en juin 2020 et que les prochaines échéances se tiendront en 2026, c’est à dire dans cinq ans, est un peu disproportionné. Les parisiens souhaitent une ville propre maintenant pas à partir de 2026.
Hormis la formule maladroite du message saccage paris, il faut s’intéresser au fond du problème. En effet le mal qui ronge la capitale depuis quelques temps déjà est incontestable. On assiste a un enlaidissement manifeste et surtout à un niveau de saleté incontestable. Sous le mot clef #saccageparis on peut retrouver les mots tels que « déchetterie, dépotoir, ville défigurée, honte » qui laissent songeurs. Voilà ce que l’on peut lire sur les réseaux sociaux.
La tentative de mise au point d’un élu
Le 6 avril 2021, le premier adjoint de la Maire de Paris se pourfendait d’un long message sur les réseaux sociaux. Il évoquait la densité de la ville de Paris en soulignant « les moyens exceptionnels mobilisés pour Paris » sur les aspects de propreté, d’esthétique et d’entretien de l’espace publique. Il présentait le mot clef saccage Paris comme « une image déformée et caricaturale de Paris ». Cet adjoint rappelait également l’existence de solutions en ligne qui permettent de déclarer les problèmes (l’application dans ma rue). Et il rappelait l’existence d’un service gratuit pour l’enlèvement des grosses ordures, limité néanmoins à deux ou trois mètres cubes. Ce service d’ailleurs fonctionne très bien.
Néanmoins la dernière partie de sa déclaration faisait un peu peur car il évoquait le lancement d’un « Manifeste pour une nouvelle esthétique ». Derrière ces mots qui peuvent sembler anodins se cachent peut-être les dépotoirs de demain. Comme par exemple le jardin Truillot dans le square des moines de Thibirine dans le 11 ème arrondissement de Paris, juste au pied de l’église Saint-Ambroise.
Paris une ville sale ?
Pour répondre au critique la Maire de Paris a invoqué des attaques provenant de l’ultra droite ou de la faschosphère. Pour rappel le RN n’a même pas obtenu les 5% à Paris lors du premier tour des présidentielles. La ficelle est un peu grosse et elle rapelle même une phrase du dirigeant communiste Joseph Staline. « Traitez vos adversaires de fascistes, pendant qu’ils se justifieront, vous pourrez leur porter de nouveaux coups. »
Mais là où la négation du réel commence à être vertigineuse, c’est lorsque le premier secrétaire du parti socialiste reprend à son compte la formule de fachosphère. L’insulte ultime dans une démocratie pour décrédibiser son adversaire et le marginaliser en le traitant d’infréquentable. Néanmoins un sondage de l’IFOP (commandé par l’union parisienne) a fait apparaître que 84% des parisiens jugent la ville comme étant sale dont 73% sont mécontents de la propreté de de l’entretien. Fin de la blague.
Vous avez dit éphémère ?
Devant les critiques, la mairie de Paris a trouvé la parade. Ils nous refont le coup de la tour Eiffel et en plus juste en face. (pour rappel à son origine, la tour Eiffel était également un monument éphémère qui devait être démonté). Le grand Palais éphémère est donc né. Il coupe ainsi la perspective du champ de Mars et participe à montrer l’action de la Mairie de Paris sur la ville.
Tout est une question de Verbatim. Les parisiens n’aiment pas l’art contemporains à ciel ouvert? ce n’est pas grave, nous allons leur en servir tous les jours sous couvert d’installations éphémères. Des installations d’illustres inconnus. Mais des artistes forcément très populaires dans un quartier de Milan, d’Amsterdam ou de Seattle et qui participent indubitablement au renouvellement du questionnement qui traverse l’urbanisme depuis ces trente dernières années.
Des lieux de résistances existent
Sur les réseaux sociaux il y a bien évidement le mot clef #saccageparis mais en plein centre de Paris il y a un lieu de résistance qui est le jardin des Tuileries. Un lieu qui dépend en fait de la sous-direction des jardins du Musée du Louvre et par conséquent il bénéficie de la protection de quelques conservateurs du musée du Louvre acquis à la question de l’importance de la conservation du patrimoine. D’ailleurs le jardin des Tuileries ne pourra pas être réinventé, il est inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco. Au grand désespoir des artistes. De tous ces gens qui sont amis avec l’homme qui connait la femme qui gère les appels d’offre de la commission paritaire mixte. Ici, l’entregent, les relations avec les galeristes et avec ceux qui font la pluie et le beau temps à Paris ne sert à rien. Ils ne pourront pas installer une horreur qui : « interroge le regard des passants et qui interpelle le visiteur tout en donnant à voir une perspective nouvelle sur une ville qui se réinvente chaque jour ». Le jardin des Tuileries peut souffler encore un peu, il est la chasse gardée du Musée du Louvre (un musée national qui dépend du ministère de la Culture).
Terminer sur une note d’espoir c’est fondamental, surtout lorsque l’on vit à Paris en ce moment.
L’urbanisme en question
Lorsque l’on voit comment évoluent les jardins et les parcs parisiens, on se dit que forcément bientôt les réalisations des paysagistes Davioud et consorts auront complètement disparues d’ici quelques années sous les coup de boutoirs de la mairie.
L’épisode des terrasses et l’anarchie
La gestion du plan de circulation
Les panneaux ont l’air de pousser assez vite sur les lampadaires parisiens. Plus inquiétant en revanche ceux-ci sont mal fixés et ils bougent avec le vent.
Le Champ de Mars ou l’exploration du champ des possibles – Carte blanche
Au-delà des polémiques sur l’architecture et les choix de la Mairie on peut se demander si il est normal en 2021 de construire un bâtiment sur l’un des trop rares espace vert de Paris?
Du mobilier urbain vendu aux enchères
Alors que la polémique sur le saccage de Paris touchait à sa fin, elle fut relancée par deux faits insolites.
Le premier c’est la disparition d’une énorme fontaine du XVIII ème arrondissement de Paris. Une fontaine déplacée pour laisser passer le tramway, puis égarée avant d’être déclarée détruite (source: Le Parisien). Désormais Paris ne derait donc plus saccagé mais détruit? un changement de champ lexical qui augure de sacré
Le deuxième fait qui permis la relance de la polémique c’est, sans doute, la vente de mobilier parisien datant du XIX ème siècle. Une vente qui a eut lieu dans une salle de ventes aux enchères de la rive droite.
Paris est une ville propre, répetez après moi.
à suivre.