L’affaire du col Dyatlov, lorsqu’une randonnée tourne au cauchemar et à la tragédie
L’affaire du col Dyatlov se déroule en 1959, en pleine période soviétique. Dix jeunes russes décident de se lancer depuis le petit village de Vijai, dans une randonnée à travers l’Oural et ce pour atteindre le mont Otorten (1234 mètres). Ils sont bien équipés, bien renseignés et surtout ils étaient tous super entraînés et en très bonne forme.
Tous sont jeunes et étudiants ce qui explique leur condition physique irréprochable. Les universités russes insistaient et insistent toujours sur la préparation physique et le sport. L’activité sportive fait partie intégrante du cursus universitaire.
Dans la nuit du 1er au 2 février alors que les neuf randonneurs dorment dans le bivouac qu’ils ont installé, tout va basculer. C’est précisément à ce moment que la randonnée va se transformer en tragédie. Il se déroule une scène dont personne ne pourra imaginer ni la complexité et la violence. Une énigme que ni les autorités russes ni les services de sécurité intérieure ne pourront résoudre. Un comble pour un pays où tout était sous contrôle pendant plus de 80 ans.
Cette mystérieuse tragédie qui a eu lieu sur le versant Est du mont Kholat Syakhl (nom en langue Mansi), fut classée sans suite en mai 1959. Un crime perpétré contre neuf randonneurs et qui reste encore de nos jours irrésolu. L’affaire du col Dyatlov était née! Pour information Kholat Syakhl signifie « la montagne morte ». (on peut également traduire par montagne de la mort ou montagne maudite)
Ce dossier a été réouvert le 1er février 2019 par les autorités russes, la date a son importance. Ce qui n’a pas manqué de relancer l’intérêt de l’opinion publique sur l’affaire. Mais à la suite de cette enquête, le parquet russe a conclu à une série d’avalanches malencontreuses. Et qui expliquent ainsi pourquoi les neuf randonneurs ont trouvé la mort une nuit d’hiver en plein milieu d’une chaîne de montagnes russes. Certains chercheurs étrangers se sont intéressés à l’affaire mais leurs conclusions sont très loin de permettre une compréhension totale de la tragédie. Et nous allons vous expliquer pourquoi.
L’équipe des randonneurs
La plus jeune des victimes avait vingt ans au moment des faits. Voici la liste des jeunes soviétiques qui se lancèrent à l’assaut du mont Otorten avant de trouver la mort sur le flanc de la montagne morte (le mont Kholat Syakhl). Une « montagne » qui culmine à seulement 1097 mètres. Un col de basse montagne qui sera renommé plus tard le col Dyatlov – en souvenir au nom du chef d’équipe de l’expédition.
1. Alexandre Sergueïevitch Kolevatov, né le 16 novembre 1934
2. Gueorgui Alekseïevitch Krivonichtchenko, né le 7 février 1935 – il sera retrouvé mort, déchaussé et en sous-vêtement dans un petit bois.
3. Nikolaï Vladimirovitch Thibeaux-Brignolles, né le 5 juillet 1935. Il a été retrouvé le crâne fracturé.
4. Igor Alekseïevitch Dyatlov, né le 13 janvier 1936, c’est le chef de l’expédition.
5. Roustem Vladimirovitch Slobodine, né le 11 janvier 1936
6. Zinaïda Alekseïevna Kolmogorova, née le 12 janvier 1937
7. Lioudmila Aleksandrovna Doubinina, née le 12 mai 1938. Son corps a été retrouvé en mauvais état, sans sa langue, sans yeux et avec 10 côtes brisées.
8. Iouri Nikolaïevitch Dorochenko, né le 12 janvier 1938. Tout comme Krivonichtchenko, son cadavre sera retrouvé près des restes d’un feu de camp. Fait étrange, il est sans chaussure et et sous-vêtement.
9. Alexandre Alekseïevitch Zolotarev, né le 2 février 1921, le plus âgé du groupe – professeur de sport et ancien militaire. Néanmoins sa biographie laisse interrogatif, celui-ci se serait « trompé » à plusieurs reprises sur des détails de sa vie et même sur ses médailles militaires. Il a été retrouvé avec trois autres corps dans le ruisseau d’un ravin sous quatre mètres de neige (en présence de Lioudmila Doubina, Alexandre Kolevatov et Nikolaï Thibeaux-Brignolles). À noter que le groupe des 4 sera retrouvé plus de deux mois après.
10. Iouri Efimovitch Ioudine, né le 19 juillet 1937*
*le seul survivant de l’expédition – victime d’une sciatique, il n’aurait pas suivi le groupe dans l’aventure.
Les corps des victimes reposent dans un cimetière d’Ekateringbourg (une des plus grandes villes de Russie autrefois appelée Sverdlosk)
Quelques journaux de bord et appareil photos ont été retrouvés. Et c’est ce qui permettra d’ailleurs de retracer une partie de leur expédition.
L’analyse de la liste des 10 randonneurs qui sont partis dans l’Oural
Lorsque l’on se penche sur la composition des randonneurs, on se rend compte qu’il n’y a seulement que deux jeunes filles qui participent à la randonnée. Loudmila et Zinaida. Elles font d’ailleurs partie des plus jeunes du groupe.
A l’inverse Alexandre Zolotarev est le plus âgé de toute la bande. Il est né en 1921. C’est l’intrus du groupe. Il est né plus de quinze ans avant tous les autres. Cet homme a fait la seconde guerre mondiale et il a obtenu l’ordre de l’étoile rouge, au grade de chevalier. Mais son passé reste trouble car des informations à son sujet diverges, comme nous avons pu le mentionner un peu plus haut.
Une randonnée dans l’Oural
Tout commence le 25 janvier 1959, l’équipe de randonneurs arrive par le train à Ivdel dans la région de Sverdlovsk. Ensuite ils prennent un camion jusqu’au village de Vijai dans le nord de la région.
Puis le, le 27 janvier 1959, ils commencent à marcher vers Ortoten. Mais le 28 janvier 1959, Iouri Ioudine abandonne brutalement le groupe. Il serait malade et doit laisser le groupe continuer sans lui. Ce sera le seul survivant. Autre fait troublant, lorsque Igor Dyatlov le quitte il lui aurait confié que le groupe aurait du retard et que la date prévue pour le 12 février ne pourra pas être tenue. Une façon de repousser le début des recherches? Pourquoi a-t-il fait cette déclaration ?
Le 31 janvier 1959 tout s’accélère. Le groupe des neuf randonneurs dépose une partie des vivres et de l’équipement qui servira pour le retour. Une façon de faire, classique dans le domaine de l’alpinisme. Elle permet de faciliter la progression dans la dernière partie de l’ascension.
Mais, le 1er février 1959 tout s’accélère, le temps est très mauvais. Les températures chutent brutalement pour atteindre les -25 degrés Celsius. Et à partir de maintenant plus rien n’est sûr. A cause du blizzard le groupe de randonneurs dévie de sa trajectoire. C’est finalement à flanc de montagne que le groupe s’arrêtera pour son ultime bivouac. Avalanches en séries ou mauvaise rencontre toutes les pistes restent ouvertes.
L’attente
La dernière personne à avoir vu les neufs randonneurs décédés est donc Iouri Efimovitch Ioudine. Les randonneurs devaient être rentrés un peu après le 12 février 1959 au village de Vijai. Dyatlov, le meneur de l’expédition avait convenu avec son club sportif d’envoyer un télégramme pour informer tout le monde était sain et sauf, à son retour. Mais ce moment n’arrivera jamais.
Le 20 février, les familles et les amis des randonneurs font pression sur l’institut Polytechnique pour que celui-ci organise des recherches.
Des étudiants et des professeurs s’organisent pour partir secourir les neuf jeunes étudiants. Les randonneurs sont peut-être après tout coincés quelque part ou tout simplement perdus. Peu de temps après, la police et l’armée se lanceront également dans l’opération de recherche. Sans succès.
Une tragique découverte : 26 février 1959
Trente jours après leur départ une équipe de secours finit par retrouver une tente. La toile est découverte sur le col Kholat Syakhil mais elle est toute déchirée. Cela n’augure rien de bon. Ses occupants en seraient sortis précipitamment sans même prendre la peine de l’ouvrir. Ce qui démontre incontestablement le caractère d’urgence et définitif de la situation. Il fallait donc fuir, coûte que coûte sans penser au matériel, ni même au froid.
C’est en suivant des « empreintes ou des traces » que les enquêteurs parcourent 500 mètres et puis plus rien. Ils décident alors d’aller explorer un bois tout proche.
le fameux groupe des deux
Et c’est à la lisière du bois que l’équipe de recherche trouve deux cadavres. Gueorgui Krivonichtchenko et Iouri Dorochenko, ils gisent là sous un grand pin, auprès des restes d’un feu de camp. Ils sont en sous vêtements et ne portent même pas de chaussures. Un scénario suffisamment étrange pour interpeller les enquêteurs et tous ceux qui s’intéressent à l’enquête.
Le groupe des trois
Un peu plus loin c’est trois autres cadavres qui sont retrouvés. Le premier corps gît à 300 mètres puis le deuxième à 500 mètres et le dernier corps à 600 mètres environ. Il s’agit de Dyatlov, le chef de l’expédition, qui est accompagné de Kolmogorova et de Slobodine. A priori on pense qu’ils souhaitaient rejoindre le camp.
Avril 1959, le groupe des 4 enfin retrouvé
Plus de deux mois après, à la faveur de conditions climatiques plus clémentes, on retrouvera finalement quatre autres corps. Ils sont retrouvés sous plusieurs mètres de neige au fond d’un ravin. Ils sont tous habillés plus chaudement.
Doubinina, Kolevatov, Thibeaux-Brignolles et Zolotarev sont les derniers corps à être retrouvés.
A l’autopsie les autorités se rendent compte que Doubina et Zolotarev ont des côtes cassées, Thibeaux-Brignolles a quant à lui, le crâne fracturé.
Doubina présente d’inquiétantes blessures. Il lui manque la langue et les yeux. Il manque également un morceau de son crâne. On retrouvera sur elle de la poudre radioactive. Un évènement suffisamment étrange pour être signalé.
D’autre part les randonneurs ont été retrouvés avec la peau marron. On appelle généralement cela, le bronzage nucléaire, qui apparaît généralement après une forte irradiation.
Les conclusions de l’enquête officielle sur l’affaire du col Dyatlov
Six randonneurs sont morts d’hypothermie et les trois autres de blessures mortelles (peut être en tombant dans un ravin)
Les victimes sont mortes entre 6 et 8 heures après l’absorption du dernier repas. En d’autres termes ils sont morts en plein milieu de la nuit.
La question irrésolue de la radioactivité
Par contre l’enquête laisse apparaître de fortes doses de radioactivité sur les corps. A noter qu’Alexandre Kolevatov est un étudiant en physique nucléaire qui a la particularité d’être passé par Moscou où il travaillait dans un ministère. Il avait également travaillé dans un lieu de production toujours en lien avec l’atome.
Iuri est ingénieur à Tchéliabinsk, il fut liquidateur lors de l’accident nucléaire de Kychtym en 1957, soit deux ans avant les faits.
Deux des neufs randonneurs avaient donc une connaissance plus où moins précise de l’énergie nucléaire. Hors la nuit de leur disparition, des observateurs feront part de leur surprise quand à l’apparition de couleurs étranges dans le ciel. Une explosion a peut-être eu lieu pendant la première nuit du mois de février 1959.
Les corps sont tellement irradiés que l’on aurait peut-être enterré les dépouilles des randonneurs dans des cercueils de plomb. Un procureur ayant fait état d’éléments « surnaturels » sera dessaisi de l’affaire. Il serait néanmoins intéressant d’effectuer des relevés de radioactivité sur tous les cadavres (et de comparer leur taux de radiation à ceux de leurs voisins de cimetière afin d’écarter toute irradiation postérieure).
Les hypothèses possibles dans l’affaire du col Dyatlov
1. Une coulée de neige a peut-être effrayé les randonneurs. Ils seraient alors sortis de la tente complètement paniqués. Certains auraient voulu faire un feu pour se réchauffer. Le groupe des trois, voyant que cela ne servait à rien, a voulu rentrer au bivouac. L’autre groupe de quatre randonneurs (mieux équipé) a peut-être voulu fuir et serait tombé dans un ravin. Le groupe des deux qui fut retrouvé sous le grand pin près des restes du feu sont peut-être les premiers à être décédés d’hypothermie.
2. Il y a peut-être eu une explosion qui a affolé les randonneurs et surtout provoqué la panique dans la tente. On rapporte d’ailleurs des essais de bombes au sodium durant l’hiver 1959. Autre possibilité, il y a peut-être eu des essais d’infra-sons qui ont perturbé et désorientés les randonneurs. Une hypothèse sensiblement proche, évoque quant à elle le test d’une bombe à vide qui aurait pu, elle aussi, être le point de départ de la tragédie. (avalanche, effet de souffle, panique et fuite) Autant d’interrogations qui sont confortées par le fait que de nombreux éléments du dossier ont aujourd’hui disparu.
Les autres hypothèses possibles dans le mystère du col Dyatlov
Une chose est sûre, les randonneurs sont sortis vivants de la tente.
Néanmoins tous les russes savent que le froid tue. Et ce fait est inscrit dans l’inconscient collectif. Par conséquent pourquoi les randonneurs ont-ils quitté leur tente sans vêtement ? Le danger auquel ils ont été confrontés, aurait donc été imminent et plus important que le risque de mourir de froid ?
3. Les Mantis, cette tribu des montagnes, ne peut pas être impliquée. Car les Mantis sont des gens très calmes et très pacifiques. D’ailleurs les livres de police ne recensent aucune attaque de la part de cette ethnie locale.
4. Il s’agit peut-être d’un rôdeur ou alors le seul survivant Iouri Ioudine n’a pas tout dit. Aujourd’hui il assure que le décès des ses neuf coéquipiers est le fait d’extra-terrestres. Une version simpliste mais suffisamment parfaite pour ne mettre personne dans l’embarras.
5. L’enquête réouverte le 1er février 2019 puis classée le 20 juillet 2019 conclura à des avalanches multiples qui ont causé la panique et la mort de tous les participants. Cette thèse est tout à fait plausible. Néanmoins pourquoi la tente n’a pas été embarquée sur une grande distance? Et pourquoi les skis des randonneurs qui avaient été enterrés sous la tente n’ont-ils pas eux aussi été embarqués avec la plaque. Enfin le déclenchement d’une avalanche n’explique en rien pourquoi des gens saint d’esprit ont couru se réfugier dans les bois (surtout sans chaussure et sans vêtement approprié).
Synthèse
Une avalanche entraînant la mort des randonneurs pourrait être réaliste. Même si le manteau neigeux n’était pas particulièrement important. Il est néanmoins probable que celle-ci aurait peut-être été provoquée par une explosion ou une déflagration. Une explosion ou des explosions multiples qui auraient d’ailleurs créé des panaches de couleurs assez incroyables. Un peu d’ailleurs comme les couleurs qui ont pu être observées lors de la catastrophe de Tchernobyl. Des couleurs suffisamment étranges pour être reportées par de nombreux observateurs qui étaient présents dans les environs lors de la tragédie. (météorologues, militaires ou randonneurs) Difficile de résoudre en quelques lignes le mystère de l’affaire du col Dyatlov. Reste neuf vies brisées en plein vol et un silence de plomb.