Tchernobyl, la catastrophe la plus grave de tous les temps

Ce qui a relancé dernièrement l’intérêt pour la plus grave catastrophe nucléaire de l’histoire n’est autre que la sortie d’une mini-série télévisée. Une série qui traite du tragique accident de Tchernobyl, très bien filmée et très bien racontée. Le tout, produit par la chaîne HBO.  Une occasion pour ne pas oublier le tragique accident nucléaire qui s’est déroulé à Tchernobyl non loin de la ville de Pripiat. Cinq épisodes d’une heure chacun pour revenir en images sur le déroulement de l’une des tragédies les plus marquantes de la fin du XX ème siècle.

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Pour accompagner votre lecture, voici un son énigmatique créé par une artiste islandaise à propos de Tchernobyl.

C’est le samedi 26 avril 1986 à 1h23 du matin que le cœur du réacteur numéro 4 entre en fusion. Et ce suite à un test pour tenter une auto alimentation du réacteur. Un essai réalisé pendant le weekend avec une équipe peu expérimentée et qui va déclencher une réaction en chaîne et finalement faire rentrer en fusion l’un des réacteurs de la centrale. C’est le pire scénario qui peut se passer pour une centrale nucléaire. D’ailleurs l’accident sera classé sur 7/7 sur l’échelle de l’INES. Et c’est malheureusement le plus haut niveau concernant la classification des accidents nucléaires. Retour en détails sur la tragédie ukrainienne.

Ce que vous ne saviez pas sur la catastrophe de Tchernobyl en Ukraine

L'Ukraine un pays victime du nucléaire civil
Vue sur la ville de Kiev la capitale de l’Ukraine

La Biélorussie, l’un des pays les plus touchés par la catastrophe

C’est lors d’un voyage au Japon, que j’ai rencontré un homme qui avait travaillé toute sa vie en tant que traducteur Russo-Japonais. C’était un homme original, humaniste et un peu communiste. Et c’est lors de ce voyage que je découvris l’ampleur de la catastrophe de Tchernobyl. Une équipe composée de chirurgiens japonais volontaires avec quelques traducteurs dont il faisait partie, sont allés en Biélorussie pour soigner et opérer des enfant victimes des radiations nucléaires. Pourquoi des enfants? Et bien parce que ce sont eux qui généralement sont les plus exposés aux conséquences des radiations nucléaires. Pourquoi fallait-il opérer les enfants? Et bien sans doute parce qu’ils étaient porteurs de tumeurs dues aux radiations et aux expositions aux radios-nucléides.

Le journal Le Monde, rappelait d’ailleurs dans l’un de ses articles que 23% du territoire Biélorusse a été contaminé suite à l’accident de Tchernobyl. (cf le reportage d’Isabelle Mandraud). Autre fait inquiétant, les maisons contaminées trente ans après les faits continuent d’être ensevelies sous terre par des bulldozers. C’est un peu comme si l’on balayait une pièce et que l’on cachait la poussière sous le tapis.

Après la catastrophe la centrale a continué à fonctionner

C’est incroyable mais vrai, alors que la centrale a subit un accident d’une extrême gravité, les autorités ont décidé de redémarrer les réacteurs 1, 2 et 3. La centrale de Tchernobyl continuera d’ailleurs à fonctionner pendant près de quatorze ans.

A la fin de l’année 1986, alors que le réacteur 4 entré en fusion est plus ou moins stabilisé, les scientifiques savent déjà qu’il restera radioactif pendant des milliers d’années. Malgré cela l’activité se poursuivra. Des milliards de dollars ont été dépensés et l’URSS ne souhaite pas se départir d’une force de production électrique. En effet le site de Tchernobyl produisait tout de même 10% des besoins électriques de toute l’Ukraine. Néanmoins pour poursuivre la production électrique avec le réacteur numéro 3, il a fallut le séparer physiquement du réacteur numéro 4. En effet les réacteurs fonctionnaient par paire et partageaient de nombreux agrégats.

Mais ce n’est pas tout, alors que le site fonctionne encore, en 1991 c’est le réacteur numéro 2 qui connaît à son tour une avarie ou plutôt un accident nucléaire. La réparation coûterait trop cher et le réacteur numéro 2 sera donc laissé à l’arrêt tel quel.

Tchernobyl devait être le plus grand site nucléaire du monde

Par contre les réacteurs 5 et 6 qui étaient encore en construction lors de l’explosion de 1986, ne seront jamais mis en exploitation. Au total c’est douze réacteurs qui devaient fonctionner sur le site. Tchernobyl devait devenir à terme la plus grande centrale nucléaire de tout l’empire soviétique.

La fermeture définitive de Tchernobyl eut lieu le 15 décembre 2000. A noter que la décision de fermer définitivement la centrale nucléaire fut prise en mars 1999 par les autorités ukrainiennes sous la pression et l’abondante aide économique de communauté internationale.

Le sarcophage a été achevé le 1er décembre 2018

Incroyable mais vrai. Une arche géante de 108 mètres de haut a été construite entre le 17 septembre 2007 et le 1er décembre 2018. L’inauguration officielle de l’arche construit par Novarka a eu lieu le 10 juillet 2019. Une gigantesque arche de confinement a donc été installée autour du sarcophage de confinement initial. Il aura donc fallut 14 ans pour limiter le niveau de radiation du réacteur numéro 4. Et encore une bonne quinzaine d’années pour terminer la doublure du sarcophage.

32 ans après l’accident de Tchernobyl, l’accident est donc définitivement clos. Enfin c’est ce que l’on aimerait bien lire.

La construction de de cette arche aura coûté deux milliards d’euros. Le consortium qui a bâti cette arche de confinement, était composé des entreprises Bouygues et Vinci. Les travaux ont connu douze ans de retard. On dit que la nouvelle arche deviendra réellement efficace d’ici une centaine d’années, or celle-ci a été conçue pour une durée de cent ans. Pour l’instant l’arche ne peut pas être réellement efficace car le niveau des radiations est encore trop élevé.

Personne n’exclu une évolution du réacteur numéro 4

Aujourd’hui personne n’est en mesure de dire dans quel état se trouve le cœur du réacteur. Le magma fondu du réacteur numéro 4 reste une énigme et il reste également sous surveillance.

Si le réacteur numéro 4 venait à connaître une nouvelle explosion le premier sarcophage et l’arche de confinement seraient alors soufflés. On estime qu’il reste à peu près 200 tonnes d’uranium et de plutonium dans le réacteur. On estime à 24 000 ans le temps de que mettront ces 200 tonnes pour se désintégrer. Mais pour que la radioactivité disparaisse, il faudra attendre peut-être 240 000 ans de plus pour que la probabilité de désintégration atteigne les 100%. Mais il ne faut jamais perdre de vue que la désintégration totale d’une particule n’est jamais certaine, elle est même assez aléatoire.

Pour le réacteur numéro 4, la prochaine étape sera le démantèlement.

Vers l’oubli de la catastrophe de Tchernobyl

Cette perspective est absolument incroyable. Comment pouvons-nous garantir que l’information concernant la pollution de ce territoire passera dans les milliers ou les dizaines de milliers d’années à venir. Une terre polluée par du mercure ou des hydrocarbures est parfois ignorée de tous.

Vous pensez que c’est de la science fiction ? Et bien sachez que le tourisme radioactif sur le site de Pripiat se développe de plus en plus. Avant la guerre en Ukraine, les visiteurs se rendaient sur place via des Tour Opérateurs légaux qui organisaient des expéditions à la journée au départ de Kiev pour environ 400 dollars.  Il existe également des cas de personnes qui vivent désormais sur la zone interdite. Il s’agit là principalement de personnes retraitées vivant généralement seules.

informations complémentaires: On estime que le plutonium 239 à une période de 24 110 ans. En ce qui concerne le Césium 137, et le strontium 90 il faudra attendre environ 30 ans. Pour le reste des particules radioactives, il faudra compter environ neuf siècles pour qu’ils atteignent le cap de la demi-vie.

Le problème des déchets engendrés par la catastrophe de Tchernobyl

– On estime qu’il y a eu un million de mètres cubes de déchets faiblement ou moyennement radioactifs qui ont été enterrés tout autour de la centrale de Tchernobyl. (déchets entre 1000 et 10 000 becquerels par gramme – source ISRN)

– Lorsque la centrale de Tchernobyl a été arrêtée, les combustibles usés des trois réacteurs ont été entreposés dans une piscine. Il s’agit de l’installation ISF 1. Mais il y a également des combustibles certains sains et d’autres endommagés qui sont quant à eux immergés dans deux bassins de refroidissement. En tout c’est 2500 tonnes de matière première radioactive qui sont entreposées à Tchernobyl.

– La plupart des particules radioactives sont aujourd’hui enfouies à quelques centimètres de terre sous la surface. C’est pour cela qu’il est formellement déconseillé de creuser lorsque l’on se trouve sur, ou à proximité de la zone d’exclusion. Creuser permettrait de libérer des particules qui se retrouveraient alors en suspension dans l’air et qui peuvent donc être inhalées. En cas de pluie, il faut faire également très attention à la boue qui peut être elle aussi radioactive.

Le risque c’est bien évidemment de respirer des particules radioactives comme de la poussière de plutonium. Celle-ci resterait alors accrochée à la paroi pulmonaire et commencerait à irradier le corps de façon continue.

Quid des déchets engendrés par la catastrophe de Tchernobyl ?

– Lors de la catastrophe dans un premier temps c’est plus 5 000 tonnes de plomb, de bore, d’argile, de dolomite et de sable qui ont été jetées sur le réacteur pour tenter de calmer les réactions en chaîne. Le plomb absorbe les rayons et le bore quant à lui, permet d’éviter la fission. Le sable permet en règle générale de circonscrire un incendie. On ne peut pas utiliser de l’eau car cela ne ferait qu’alimenter l’incendie et cela pourrait provoquer une réaction en chaîne encore plus grave.

Les sarcophages du réacteur numéro 4

Le premier sarcophage est donc composé de 300 000 tonnes de béton et d’acier. Cette enveloppe fait 50 mètres de hauteur. Construit à la hâte entre les mois de mai et de novembre 1986, ce sarcophage s’est rapidement dégradé. En février 2013, le toit du sarcophage commence à céder sous le poids de la neige. C’est un grand classique dans les pays froids. L’hiver, des tonnes de neiges se déposent sur les toits des bâtiments. Et lorsque ceux-ci ne sont pas déblayés, ils finissent avec les années par s’effondrer. Hiver après hiver, la neige aura donc endommagé le toit du sarcophage du réacteur. A partir de cet instant la radioactivité commença de nouveau à s’échapper dans l’atmosphère et la construction d’un second sarcophage est alors en cours.

La construction du deuxième sarcophage aura donc débuté le 17 septembre 2007 et aura été achevé pour le 1er décembre 2018. Techniquement, ce dôme est prévu pour résister un siècle. Une immense structure métallique de 108 mètres de haut, pour une longueur au sol de 257 mètres sur 162 mètres de large. Les travaux ont été menés par le consortium Novarka.

Les conséquences de l’accident nucléaire de Tchernobyl

Officiellement c’est 50 personnes qui sont décédées suite à l’explosion du réacteur numéro 4. L’UNSCEAR (le comité scientifique de l’ONU) n’a reconnu, quant à lui, à ce jour qu’une trentaine de décès. Des décès qui peuvent être imputés directement à Tchernobyl pour le reste on repassera.

Les pompiers, premières victimes la catastrophe de Tchernobyl

Lorsque l’explosion a lieu, les opérateurs de la centrale contactent les pompiers de Pripyat pour un incendie sur le toit de la centrale au-dessus du réacteur numéro 4. La caserne se trouve à trois kilomètres seulement de la centrale. Lorsque les pompiers se rendent sur les lieux, ils pensent avoir affaire à un incendie classique. Les pompiers n’ont alors aucun équipement spécifique de protection. Aucune surprise, les pompiers vont tous décéder à cause des radiations aiguës ou des brûlures induites. Il est possible de voir les photos de ces hommes au musée des héros de la nation de Kiev.

A noter que tous les opérateurs qui sont sortis du poste de contrôle le 26 avril 1986 pour approcher du réacteur sont également décédés.

En tout ce seront 600 pompiers qui seront intervenus dont 134 seront victimes immédiatement du syndrome aigu d’irradiation. Officiellement certaines agences (hors UNSCEAR) admettent que cette catastrophe aurait entraîner directement la mort de 60 à 4000 personnes. Et c’est chiifres sont largement discutables.

L’étouffement du réacteur en fusion

Pendant les dix-huit jours qui suivirent l’explosion ce seront 1000 pilotes d’hélicoptères qui viendront faire des rotations pour tenter de stopper la fusion du réacteur nucléaire. En tout, l’étouffement du réacteur numéro 4 aura duré du 26 avril au 14 mai 1986.

Quid des liquidateurs de la centrale de Tchernobyl ?

Lorsque l’explosion du réacteur numéro 4 de la centrale nucléaire survient, les autorités soviétiques pensent pouvoir faire intervenir des robots. Les robots auraient été utilisés pour effectuer des travaux de conservation autour du réacteur nucléaire. Malheureusement à cause des radiations les circuits imprimés grillent. Il faudra donc faire intervenir des hommes pour déblayer les débris radioactifs. Les conséquences seront tragiques pour tous ceux qui ont été exposés à des radiations hors norme.

Les hommes qui interviennent sur le site de la catastrophe de Tchernobyl seront appelés des liquidateurs. Ils viendront de toute l’URSS, pour travailler sur le lieu d’une avarie nucléaire hors du commun. Aujourd’hui, on ne connaît toujours pas l’ampleur du désastre sur la santé des hommes qui sont intervenus lors de la catastrophe.

Les liquidateurs auraient été entre 600 000 et 1 000 000 à intervenir sur le site de Tchernobyl. Il n’existe à ce jour aucune statistique sur les morts qui sont directement imputables aux radiations. Ce que l’on sait, c’est qu’un tiers de la population de Pripyat est décédée des suites de l’accident.

Concernant les liquidateurs on pense que près de 200 000 d’entre eux sont décédés des suites de leurs expositions prolongées aux radiations. En 2011, certaines chaînes de télévisions russes ont, quant à elles, fait état de 400 000 liquidateurs décédés.

Le cas des mineurs

Après des dizaines de jours de largage par hélicoptère de sable, de plomb, de bore, d’argile et de dolomite pour tenter d’étouffer la réaction nucléaire, les autorités et les scientifiques soviétiques décidèrent de creuser une galerie jusqu’en dessous du réacteur nucléaire.  Ce tunnel devait permettre d’y injecter de l’azote liquide. La meilleure solution  afin de refroidir le cœur du réacteur. Et surtout de refroidir le corium, un phénomène appelé le syndrome chinois. (le coeur du réacteur s’enfonce dans le sol).

Des mineurs furent envoyés sur place pour creuser un boyau sur 170 mètres de long.

Il y a d’un côté 160 mineurs originaires de Tula en Russie, des « tchernobiliets ». Mais il y aurait eut également près de 240 mineurs originaires du bassin houillé du Dombass (Est de l’Ukraine).

Des hommes qui ont passé des jours à creuser et à pousser des wagonnets de terre contaminée. Ils auraient été 400 à travailler dans des conditions irréelles. Difficile de savoir aujourd’hui ce qu’ils sont devenus.

L’histoire du nuage de Tchernobyl

Il aura fallu donc trois jours pour que l’Occident soit informé de la catastrophe de Tchernobyl. Un communiqué laconique émis par l’agence TASS (organe de presse de l’URSS) et signé par le conseil des ministres de l’Union Soviétique. Dans ce texte on ne reconnaît d’abord que des blessés et ce afin de dissimuler le plus possible l’ampleur de la catastrophe. Mais très vite il devient impossible de nier l’évidence, d’autant plus que les européens commencent à relever des taux de radiations sur leur propre territoire.

Le signal d’alarme suédois

En Europe, ce sont les suédois qui ont été les premiers à détecter quelque chose. Ils pensent d’abord à un problème sur leur propres centrales. Après une rapide inspection, les autorités suédoises comprennent que le problème provient de l’étranger. Puis les européens soupçonnent un test souterrain d’une bombe nucléaire qui aurait mal tourné. Mais les taux relevés sont vraiment trop élevés et les composants retrouvés très inquiétants. Démasqués par les Soviétiques devront expliquer les raisons de cette radioactivité. Les images d’un réacteur nucléaire éventré sont publiées et elles feront immédiatement le tour du monde. L’opinion publique comprend alors le risque que comporte une centrale nucléaire.

les conséquences pour le reste de l’Europe

L’iode 131 et le Césium 134 et 137 qui résultent de la fusion de l’uranium partent donc dans les airs. Dans un premier temps le nuage se dirige vers la Scandinavie. Puis ces particules descendent vers l’Allemagne, l’Autriche et le Nord de l’Italie. On sait également qu’environ quarante mille kilomètres carrés du territoire ukrainien ont été très fortement touchés par le nuage et ont été fortement contaminés.

Si les particules radioactives ont pu être disséminées aussi rapidement c’est parce que lors de l’explosion, les particules – les radios-nucléides – ont été projetées très haut dans l’atmosphère. On parle de projections qui ont pu atteindre une hauteur de 1 200 mètres mais c’est peut-être plus. Puisque l’explosion du réacteur numéro 4 est estimée à plus de cent kilotonnes. Les particules ont pu ensuite partir au gré des vents à travers l’Europe.

L’arrivée du nuage sur le territoire français

A l’époque aucune mesure n’a vraiment été prise contre l’arrivée de ce nuage radioactif. Avec en première ligne le professeur Pèlerin. Un homme qui explique en long en large et en travers que l’arrivée du nuage en France ne sera pas dangereux pour la santé. D’ailleurs la France est l’un des rares pays qui n’aura pris aucune mesure pour se prémunir des retombées radioactives de la centrale de Tchernobyl.

Mais pourquoi le nuage est-il dangereux? tout simplement parce que le plutonium va directement se loger dans le foie, le Césium 137 se loge dans les muscles. L’iode 31 qui est un gaz, passe des poumons, puis dans le sang et il va finalement se fixer dans la thyroïde. Et à moyen terme cela signifie des cancers et des morts parmi la population générale.

Corse, Alpes et Alsace, les trois régions françaises les plus touchées

Pendant une dizaine de jours le nuage sera sur le territoire français. C’est d’abord l’Est et le Sud-Est de l’hexagone qui seront touchés. En France seule la Bretagne sera véritablement épargnée.

La Corse sera touchée plus sérieusement étant donné que les détecteurs de radiation se sont déclenchés à la caserne des pompiers d’Ajaccio. Le record de radioactivité pour le territoire français sera enregistré dans le parc du Mercantour. Les Montagnes des Alpes vont en partie « arrêter le nuage ». Mais c’est la neige qui va aggraver la situation. En effet il va se produire une concentration de la radioactivité dans les sols lors de la fonte des neiges.

L’Alsace ne sera quant à elle pas épargnée et de nombreux cancers spécifiques aux radiations ont été malheureusement diagnostiqués. Officiellement seuls quelques dizaines de cas de cancer de la thyroïdes ont pu être directement imputés à la catastrophe de Tchernobyl. Pour le reste, c’est un peu « circulez il n’y a rien à voir ». L’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) attaquera d’ailleurs l’état français en justice. Cela aboutira en 2011 à un non lieu prononcé par la Cour d’appel de Paris. En 2012 la cour de Cassation déclarera qu’en l’état actuel des choses il est impossible d’établir un lien de cause à effet entre la retombée du panache radioactif et les cas de cancer de la thyroïde.

La détection du nuage en France – 1986

A Saclay, le Commissariat de l’Energie Atomique découvrira lors du printemps 1986 un fort taux de radioactivité. Ce centre contacte alors les autres centres comme celui de Fontenay aux Roses et les centrales nucléaires françaises. Mais aucun interlocuteur n’est en mesure d’expliquer le phénomène. En mai le nuage est donc au-dessus de la France mais personne ne parle. Alors que les taux sont 400 fois supérieurs à la moyenne. Et lors des périodes de pluie la situation est encore plus grave. Les précipitations faisant retomber au sol les petites particules radioactives présentent  dans l’atmosphère.

En Italie, en Autriche ou en Allemagne on interdit aux populations de consommer des produits frais (salades, pas d’herbes pour le bétails, légumes, lait etc.). Et on demande même aux gens de ne pas sortir lorsqu’il pleut. En France aucune mesure de ce type ne sera retenue.

Tout savoir sur Tchernobyl

« On estime que trois quart du territoire européen a été touché par

le nuage de Tchernobyl »

Des millions de personnes vivent sur des territoires contaminés

La catastrophe de Tchernobyl qui a eu lieu durant le printemps 1986 continue d’avoir un impact sur la vie de millions de concitoyens européens.

On retrouve des territoires contaminés un peu partout aux alentours de la centrale. En Russie, en Biélorussie et en Ukraine, ce sont des millions de personnes qui vivent dans des zones qui restent toujours contaminées.

Par exemple en Ukraine, il y aurait plus de trois millions personnes qui vivraient sur des terres contaminées. En Russie ils sont deux millions et demi et en Biélorussie ils seraient deux millions. A noter que c’est évidemment la zone de la Biélorussie qui est la plus préoccupante aujourd’hui. Pour rappel la centrale se trouve à seulement sept kilomètres de la frontière.

Ce serait en tout 130 000 kilomètres carrés – soit un tiers de la France – qui aurait été concernés par cette pollution radioactive.

Les lieux les plus emblématiques de Tchernobyl

Parmi les lieux les plus connus de la zone d’exclusion, il y a tout d’abord les installations de la centrale nucléaire Lénine. Et notamment les deux réacteurs qui ont connu des avaries graves et tragiques. Tchernobyl se trouve à trois kilomètres à peine de la ville de Pripyat et à environ 130 kilomètres de la ville de Kiev, la capitale ukrainienne.

L’un des lieux les plus emblématiques de Tchernobyl, c’est également le parc d’attraction et sa fameuse grande roue. Un lieu assez mélancolique et assez triste puisqu’en fait l’ouverture de ce parc était programmé pour la fête du travail, le premier mai 1986. L’explosion du réacteur de Tchernobyl a eu lieu cinq jours avant l’inauguration officielle. Le parc n’a donc jamais été réellement ouvert au public.

La zone d’exclusion, un lieu étrange et particulièrement préservé

Après avoir dévasté l’environnement immédiat de la centrale nucléaire, les conséquences de l’explosion ont aujourd’hui un impact sur l’environnement.  C’est le côté absurde de la situation puisque la création d’une zone d’exclusion a permis la création d’une sorte de sanctuaire naturel qui reste malheureusement radioactif. En 2026, cela fera tout de même quarante ans que cette zone aura été laissée « en jachère ». Petit à petit la végétation commence à recouvrir certaines installations de l’époque. Petit à petit, c’est un terrain de football qui disparait. Puis une route qui se morcelle ou encore un bâtiment industriel qui s’écroule.

La zone d’exclusion de Tchernobyl est immense. Elle s’étend en effet sur une superficie de plus de 2600 kilomètres carrés. De temps à autre on peut trouver de petits panneaux un peu rouillés qui indiquent que la zone est radioactive.

Mais que faisaient réellement les soviétiques à Tchernobyl ?

Pour comprendre l’importance de la centrale de Tchernobyl, il est important de s’intéresser aux installations qui jouxtent ce lieu de production d’électricité. En effet non loin de Tchernobyl se trouve un immense récepteur radar nommé le Duga 3. Cette installation militaire aurait eu entre autre, la fonction de déceler toute attaque de missile éventuelle.

Le radar est tellement puissant que les radiophonistes amateurs arrivent même à capter son signal sur les ondes. On l’appelle d’ailleurs le Pic-Vert russe en référence à son bruit caractéristique que l’on peut capter son signal sur les ondes à grande fréquence.

Qu’est-ce qu’un réacteur de type RBMK ?

La présence de matériel militaire conforte l’idée que le site de Tchernobyl avait été pensé pour être au service de la production d’électricité mais aussi pour jouer un rôle sur le plan militaire. En effet les réacteurs nucléaires RBMK sont également en capacité de produire du plutonium militaire. En d’autres termes, la centrale de Tchernobyl devait produire des composants nécessaires à la fabrication de la bombe atomique.

Le Plutonium

Pour rappel le plutonium n’existe pas à l’état naturel. C’est un élément qui est créé via des processus d’enrichissements. Pour disparaître le plutonium met environ 240 000 années pour disparaître complètement. Cet élément met 24 000 ans pour perdre une demi-vie.

RBMK pour un usage civil et militaire

Un réacteur RBMK est un réacteur pensé et conçu en URSS. Un système unique au monde. Les réacteurs RBMK ont la particularité de ne pas avoir de grandes cuves. Ces cuves que l’on retrouve généralement dans les réacteurs bouillants et pressurisés. Cette conception permet également de ne pas recourir aux services d’une grande tour de refroidissement ou d’échangeur de vapeur. On peut également le charger et le décharger en marche. Malgré ces avantages et la forte capacité de production électriques de ces réacteurs nucléaires RBMK, cela reste un procédé relativement instable. Par exemple, à partir de 70% de sa puissance, un réacteur RBMK commence à devenir instable. Et plus on baisse la puissance du réacteur et plus cela devient dangereux. Cette technologie nucléaire civile pouvait sembler fiable au premier abord.

Le silence trouble des autorités soviétiques

Avec l’explosion du réacteur numéro 4, les autorités soviétiques sont KO debout. L’impensable vient d’arriver. Les espoirs autour du fleuron de l’industrie nucléaire sont stoppés nets. Une centrale nucléaire soviétique de type RBMK vient de connaître une avarie gravissime.

Pendant plusieurs heures les informations ne sont pas remontées à Moscou. D’un autre côté les autorités de l’ex-URSS ne sont  pas réellement pressées d’annoncer la catastrophe de Tchernobyl au monde. Reconnaître cette tragédie c’est faire preuve d’une certaine faiblesse, ce qui est impensable dans le monde soviétique.

Une explosion ne pouvait pas arriver

Mais si les informations n’ont pas été tout de suite communiquées au reste du monde, c’est aussi parce qu’à Tchernobyl, on a tardé à faire remonter les informations à Moscou. Certains scientifiques ont par exemple remarqué qu’une irradiation provoque d’une part un « bronzage » nucléaire et elle pourrait même provoquer un état euphorique. En plus de ne pas vouloir s’attirer les foudres des hauts dignitaires soviétiques, il se pourrait bien que les travailleurs de la centrale aient été incapables de faire remonter des informations concrètes et en rapport avec la situation réelle.

Pire les irradiations auraient pu leur donner un brun d’optimisme. De plus les responsables de la centrale, comme les opérateurs, ne pouvaient pas envisager une explosion du réacteur. C’était impensable qu’un problème de ce type arrive en URSS. Ils étaient donc dans le déni de la catastrophe et ce malgré la forte présence de graphite sur le site. (Le graphite est utilisé pour la construction des murs d’enceinte de la centrale.) La présence de graphite indiquait très clairement que l’enceinte du réacteur s’était discloquée.

Une catastrophe nucléaire qui embarrasse tout le monde

L’URSS ne souhaite donc pas trop communiquer sur l’accident de Tchernobyl. Il faudra d’ailleurs attendre près de trois jours pour que l’information soit annoncée par l’agence de presse soviétique TASS. Celle-ci sera reprise immédiatement par les chaînes de télévision de l’URSS.

En Occident, c’est un peu la même chose, américains comme européens ne souhaitent pas trop affoler leur population. Leur préoccupation première est de ne surtout pas inquiéter l’opinion publique en communiquant trop vite sur la catastrophe de Tchernobyl. Car les gouvernements ne veulent pas faire naître un sentiment de peur qui irait à l’encontre d’une l’industrie nucléaire. Une industrie qui dans les années 80 n’en était qu’à ses débuts.

Tchernobyl une menace qui continue de planer, l’incendie du 4 avril 2020

Le 4 avril 2020 un homme de 27 ans mettait le feu à de l’herbe sèche dans la région de Tchernobyl. Or cet incendie a pris de l’ampleur et il s’est approché jusqu’à 1,5 kilomètre de la centrale nucléaire. L’ONG Greenpeace s’était également permise de déclarer à ce moment que c’était le pire incendie que la zone d’exclusion de Tchernobyl avait connu durant ces trente dernières années. Sergiy Zibtsev aurait déclaré à l’AFP que le feu aurait pu dévaster jusqu’à 20 000 hectares. Cet incendie a en effet pu raviver les niveaux de radiations de la zone d’exclusion. Avec l’incendie dans la zone très contaminée de Polesskoie ce sont des milliers de particules qui sont parties dans les airs et des taux de radiation seize fois supérieures à la moyenne ont pu être enregistrés. Il aura fallu près de 600 tonnes d’eau et l’arrivée de la pluie pour que l’incendie soit maîtrisé le 14 avril 2020. En l’espace de 10 jours c’est tout de même 37 500 hectares qui ont été dévastés par les flammes. Il aura fallut l’intervention d’un millier de pompiers et de 120 véhicules mais aussi du largage d’eau par hélicoptères et hydroptères.

2020 – Les feux un risque permanent pour les 25 000 prochaines années

Si les feux de forêts sont dangereux c’est tout simplement parce qu’ils permettent la libération à l’air libre des particules radioactives contenues à la fois dans les sols mais aussi dans les arbres et dans les plantes. Le plutonium, le Cesium 137 et le Strontium 90 se sont accumulés avec les années dans la biomasse. Chaque incendie vient réactiver la radioactivité et met en péril d’autres zones qui pourraient se voir contaminer à cause de cette nouvelle dispersion. A Kiev par exemple, du 9 au 11 avril 2020, la présence de Cesium 137 a été multipliée par 700, sans toutefois atteindre les seuils d’alerte et sans que cela n’ait de conséquence sanitaire. (déclaration de l’IRSN)

2022 – La prise militaire de Tchernobyl par l’armée russe lors de la guerre en Ukraine

Après huit années de combat de « basse intensité » dans l’est de l’Ukraine, la Russie est entrée en force sur le territoire ukrainien le 24 février 2022. Lors de cette attaque surprise que l’on pourrait appeler « blitzkrieg » (une tactique militaire utilisée par les nazis), les russes se sont emparés de la centrale de Tchernobyl. L’objectif de la prise de Tchernobyl étant de marquer les esprits et peut-être de raviver les blessures psychologiques de 1986. Mais c’était également la première fois dans toute l’histoire de l’humanité que des forces armées étrangères prenaient de force le contrôle d’un site nucléaire sensible. Quelques mois plus tard, la centrale de Zaporija subira le même sort. La plus grande centrale nucléaire d’Europe en activité et donc occupée par l’armée russe.

L’occupation du site de Tchernobyl par l’armée russe

Les responsables ukrainiens qui veillent sur les quatre réacteurs nucléaires de Tchernobyl qui sont désormais à l’arrêt ont essayé de prévenir les soldats des risques de radiation.

Les techniciens ukrainiens ont ensuite abandonné tout espoir de prévention lorsque les soldats russes ont commencé à mener des activités dans la forêt rousse. Une bande de terre qui a été soumise à des radiations absolument hors norme. Les soldats russes auraient réalisé des travaux de terrassement en vue de parer toute contre-attaque de la part de l’armée ukrainienne. On sait que l’armée russe a quitté le site en date du jeudi 31 mars 2022. On sait également que de nombreux soldats russes ont été hospitalisés en territoire biélorusse à Homiel. Les médecins biélorusses quant à eux auraient refusé d’apporter des soins aux soldats de peur d’être contaminés. Moscou aurait alors diligenté une équipe de médecins pour s’occuper des soldats irradiés lors de l’occupation du site.

crédits photos: Yann Ve