Faut-il prononcer Kyiv ou Kiev ?

Depuis quelques années maintenant se déroule une bataille jusque dans la prononciation de la capitale ukrainienne. Depuis des décennies les russes lorgnaient sur la péninsule de Crimée. Lorsque l’on voyageait en Russie avant 2014, il n’était pas rare d’entendre les russes se plaindre et de revendiquer ce petit bout de territoire. La petite musique de ce « territoire perdu » ne cessait de monter dans le bruit médiatique des médias russes. La Crimée c’est cette grande péninsule de 27 000 kilomètres carrés que Nikita Khrouchtchev, alors premier secrétaire du PCUS, leur aurait arraché en 1954. Et puis avec le temps et une succession d’évènements géopolitiques, l’extrême Est de l’Ukraine est devenue sécessionniste, la Crimée est même devenue « indépendante » en 2014 et l’existence même de l’Ukraine comme pays fut même remise en cause tout au long du mois de février 2022, par le chef du Kremlin lui-même. Dans les moments troubles et les périodes de guerre il est important d’expliquer pourquoi il faut écrire Kyiv et non Kiev.

Doit-on dire Kyiv ou Kiev
Doit-on dire Kyiv ou Kiev ?

Pourquoi il est désormais important d’écrire et de prononcer Kyiv !

Devant la réécriture de l’histoire il faut se replonger dans le droit international public et l’histoire. Le droit international public reconnaît l’existence d’un pays à partir du moment où l’on peut constater la coexistence de plusieurs éléments.

L’existence d’un peuple, d’une langue qui lui est propre et d’un territoire sont les trois éléments constitutifs d’un pays. Pour le droit public ces éléments suffisent pour la reconnaissance d’un état. Il faut ajouter néanmoins à cela deux conditions subordonnées: un hymne et un drapeau. L’existence du peuple ukrainien est attesté depuis le début du premier millénaire, puisque Kyiv fût créée par des seigneurs ukrainiens vers le V ème siècle. Le territoire, celui-ci existe depuis près de quinze avec des périodes d’occupation plus ou moins longues. Et des alternances entre les occupants (Russes, Ottomans, Soviétiques) comme c’est d’ailleurs le cas pour de nombreux pays des Balkans.

En l’occurence ce qui nous intéresse c’est évidemment la langue pour prouver que l’Ukraine est bel et bien un pays et non une province adhoc. L’existence de deux orthographes pour le nom des villes ukrainiennes atteste incontestablement de l’existence de plausible de deux langues distinctes appartenant certes au groupe des langues slaves. Un système bilingue qui s’est donc instauré au fil des siècles, avec l’utilisation indifférenciée du russe ou de l’ukrainien. La prononciation peut sembler dérisoire et totalement futile au premier abord. Mais c’est elle qui est le marqueur d’une autre orthographe et donc d’une autre langue. Cette langue étant elle-même l’élément constitutif d’une nation. Ne dit-on pas que le diable se cache dans les détails ?

La géopolitique de l’orthographe et de la prononciation

Kiev est donc la transcription en alphabet latin depuis la langue russe. Alors que Kyiv est la traduction depuis l’ukrainien.

Bien que le fait d’écrire Kyiv et de prononcer 〈kyiv〉 peut sembler insurmontable à nos neurones déjà formatées depuis des décennies, il est, en pratique très facile de dire en français « Kive ». Soyez donc sur le Qui Vive, pour que l’on ne réécrive pas l’histoire à votre place.

Pour ceux qui souhaitent avoir la prononciation exacte il suffit d’insister un tout peut plus longtemps sur le i et de prononcer un i guttural.

La résistance à l’oppresseur peut parfois prendre des tournures auxquelles on ne s’attend pas. Prononcer Kyiv est un acte de solidarité avec le peuple ukrainien et c’est aussi une sorte d’acte de résistance passive.

Longue vie à Kyiv, la belle et éternelle capitale ukrainienne.